Ce que pensent les élus du RIC Constituant

Ce que pensent les élus du RIC Constituant

Les élus français ne manquent pas d’arguments pour s’opposer à l’instauration du RIC Constituant (RICC). Que disent les élus des pays qui disposent déjà de cet outil démocratique ? Que des disent les élus et membres du gouvernement en France ? Que dit la recherche scientifique ?

Témoignage d’un élu suisse, Olivier Français, PLR (libéraux radicaux)

Dans cette vidéo, l’élu suisse liste les arguments suivants en faveur du RICC :

  • Dans notre gouvernance, on a un consensus politique : des forces de gauche, droite, du centre qui travaillent ensemble.
  • Le citoyen EST associé ; c’est le citoyen qui décide.
  • Pour ma part, j’ai un travail à 50% en plus de ma charge à Berne.
  • C’est la meilleure des solutions pour construire ensemble et prendre en compte les différences de chacun.

Témoignage d’un président uruguayen

À la question de savoir s’ils avaient tenu compte du possible déclenchement d’un référendum d’initiative citoyenne avant de soumettre un projet de loi au Parlement, voici ce que répond Sanguinetti, l’un des 3 présidents uruguayens interrogés :

Si on ne tenait pas compte de cela, cela serait presque un suicide. C’était décisif ; surtout concernant des réformes fondamentales comme celle des retraites, qui est la mère de toutes les batailles dans les sociétés contemporaines… (Magni-Berton & Morel, Démocraties directes, 2002, p.  394).

Que disent les élus français sur le RIC Constituant ?

Nous vous laissons juger de l’écart entre les discours d’élus de pays qui disposent d’un RICC et ceux des élus français. Ces derniers s’appuient sur des représentations naïves, voire erronées, comme l’attestent les recherches. Ils oublient, volontairement ou non, que le RICC a été inventé en France au moment de la Révolution française et que c’est ce RICC qui a inspiré les suisses.

Le président Macron : Le modèle suisse est inadapté en France

On n’est pas du tout fait pour ça. Je crois aux identités profondes des peuples. La France n’est pas la Suisse et la Suisse ne marche pas aussi bien qu’on le pense. Le modèle suisse est inadapté. La Suisse, c’est 6 millions de personnes. Et d’ailleurs les Suisses, comme disait je ne sais plus qui, ils commencent toujours avec des questions de gauche et ils finissent avec des réponses de droite. Il y a un système confédéral, avec une présidence tournante, des équilibres politiques très différents, un rapport différent à l’ouverture/ fermeture, une acceptation des inégalités, un rapport au monde qui est profondément différent. […] Nous sommes un peuple violent, depuis des siècles et des siècles. La France n’est pas la Suisse.

https://www.lepoint.fr/politique/emmanuel-berretta/referendum-pour-macron-le-modele-suisse-est-inadapte-a-la-france-01-02-2019-2290574_1897.php

Sur le thème du « peuple violent », chacun pourra rappeler au président Macron que ce sont les élus et représentants qui font tirer sur les foules et déclenchent les guerres, et non les citoyens.

Les députés français parlent du RIC en 2018

Cette vidéo présente des interviews d’élus français en 2018 sur des propositions de référendums.

La commission des lois de l’Assemblée nationale a examiné 3 pétitions déposées par Espoir RIC (les 5/04/2023, 11/10/2023 et 29/04/2024).

Voici les arguments des députés opposés au RIC Constituant et quelques contre-arguments.

Le RICC créerait une concurrence entre les représentants et les représentés.

Non, le RICC ne crée pas d’opposition. Il permet, en revanche, un nouveau rôle pour les citoyens tout en donnant un nouveau pouvoir au Parlement, en lui donnant la possibilité de faire appel à l’arbitrage du peuple en cas de désaccord entre les deux chambres. Les élus d’opposition d’une même assemblée bénéficient de l’appui de la population quand ils proposent une mesure approuvée par la majorité des citoyens, même si la majorité parlementaire est contre.

La Constitution est la garantie de stabilité de notre pays. Avec un RICC, elle serait soumise aux aléas de l’opinion publique ou à des intérêts particuliers.

Chacun constate déjà que les aléas des opinions des représentants permettent de faire et défaire les lois au gré des alternances. Chaque député ou ministre veut faire passer sa propre loi, sans même attendre un bilan de la précédente, parfois juste pour satisfaire à des intérêts particuliers. La Constitution de 1958 a elle-même été modifiée à 24 reprises sans demander l’avis du peuple. Les recherches montrent justement que les pays disposant d’un RICC sont parmi les plus stables et les plus prospères économiquement.

Que disent les recherches ?

Les recherches scientifiques internationales montrent que les discours des élus et représentants français sur le RICC témoignent au mieux de leur méconnaissance du sujet et au pire de leur mauvaise foi.

Les citoyens français sont mécontents de leur « démocratie » représentative

Il en résulte un fossé entre les citoyens et les élus, que ces derniers nomment « une crise de la démocratie ».

La démocratie directe permet de lier décisions politiques et choix éclairés des citoyens. Les recherches montrent que les électeurs rejettent les propositions extrêmes, réduisant le risque de décisions déraisonnables.

Les élus, confrontés à cette « concurrence » sont poussés à améliorer la qualité des décisions prises et acquièrent une plus grande légitimité.

L’usage des référendums permet aux citoyens d’être satisfaits d’un processus équitable : même si le résultat n’est pas toujours celui qu’ils espéraient individuellement, chacun peut exprimer son choix. En revanche, les citoyens sont attentifs à ce que les décisions soient prises par le biais de discussions et d’un examen attentif des avantages et des inconvénients.

En démocratie directe, les désaccords entre les citoyens et leurs représentants peuvent se résoudre par le biais de référendums à l’initiative des citoyens.

Certains élus s’opposent donc à ces contraintes au prétexte que cela nuirait au bon fonctionnement des institutions représentatives électorales alors qu’en réalité, c’est l’inverse qui se produit (Gherghina & Miscou, 2022).

Le RICC est parfaitement compatible avec le travail parlementaire

Les recherches montrent que les élus jouent un rôle essentiel dans le déroulement des votations et des campagnes qui les précèdent.

Tant qu’aucune initiative citoyenne n’aboutit, les membres du gouvernement et du Congrès conservent la possibilité de :

  • mettre à l’agenda les sujets qu’ils pensent nécessaires ;
  • développer des propositions de lois ;
  • régler les détails de leur mise en œuvre ;
  • voter les lois (El-Wakil, 2021).

Ainsi, les élus des systèmes de démocraties représentatives gagneraient à introduire le RICC car, plutôt que de nuire aux institutions représentatives électorales, il leur permettrait de mieux représenter les intérêts pluriels de la population dans les processus de décision à moyen et long terme et de jouer leur rôle de représentants réellement démocratiques (El-Wakil, 2021).

La Suisse n’est pas le seul pays à fonctionner avec un RICC

Le RIC dont on a beaucoup parlé depuis 2018 s’est beaucoup développé dans le monde depuis 100 ans. Tour d’horizon mondial de ce nouveau droit citoyen.

Ce qui est intéressant à noter c’est que son développement dans le monde ressemble à d’autres droits citoyens comme élire un Parlement ou le droit de vote : les politiques au pouvoir sont naturellement très réticents à donner des droits qui deviennent vite des contre-pouvoirs et commencent par limiter le plus possible les nouveaux droits. Ainsi pour les parlementaires nommés par le roi ou le droit de vote uniquement aux hommes très riches. Les politiques introduisent donc souvent dans les RIC de nombreuses contraintes. (Extrait de Magni-Berton, R. & Egger, C., 2019, https://revue-democratie.org/le-ric-dans-le-monde-et-ses-differentes-applications)

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter le lien ci-dessus et notre article.

Enfin, pour nous/vous prémunir des toujours possibles « RIC bidons », vous pouvez aussi visionner cette vidéo.

Références

El-Wakil, A. (2022). L’impact de la démocratie directe sur les élus. In Magni-Berton et Morel, Démocraties directes, pp. 314-320.

Gherghina, S. et Miscou, S. (2022). Les effets de la démocratie directe sur la confiance dans les institutions et la démocratie. In Magni-Berton et Morel, Démocraties directes, pp. 295-300.

Magni-Berton, R et Egger, C. (2019). RIC : le référendum d’initiative citoyenne expliqué à tous : au cœur de la démocratie directe. FYP Éditions.

Magni-Berton, R. et Morel, L. (2022). Démocraties directes. Bruylant Éditions.(ouvrage collectif rédigé par 40 chercheurs de 16 pays)